L'augmentation de la durée de vie est une chance
18.01.2024
seniors - bien vieillir
L'article
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Rédigé par Serge Le Boulch, Président fondateur de Récipro-Cité
Nous vivons une période de transitions sans pareille dans l’histoire de l’humanité : transitions et fractures écologique, climatique, démographique et numérique. En avons-nous tous pleinement conscience ? Sommes-nous préparés à les affronter ? Peut-être pas…
Transition démographique et solidarité intergénérationnelle
Nous sommes tous confrontés au vieillissement de nos proches. J’ai raconté il y a 5 ans dans un TedX¹ comment j'avais pris conscience des formes multiples que le vieillissement pouvait prendre suivant notre état de santé, notre lieu de résidence, la persistance ou l’absence de liens familiaux et amicaux. J’ai décrit à quel point la solitude pouvait être mortifère, à quel point la relation humaine, la camaraderie, l’amitié, l’amour sont des sources inépuisables de joie de vivre, à tous les âges de la vie. Je terminais alors mon propos par ces mots :
« L’augmentation de la durée de vie est une chance. La chance de pouvoir vivre ensemble et avec nos aînés plus longtemps et de profiter pleinement d’une relation vraie entre générations. Alors dans ce monde qui va trop vite, prenons le temps. Prenons le temps d’aller plus souvent vers l’autre, d’écrire, de téléphoner, de se rencontrer, de partager des repas, des moments de joie… et de se dire qu’on s’aime quand il en est encore temps »
Une société qui compte de plus en plus d’âgés, de plus en plus âgés...Comment fait-on ?
Depuis longtemps, je sais que nous devons repenser notre relation avec nos aînés, surtout avec ceux qui sont éloignés de leur famille, ceux qui - devenus plus vulnérables ou plus seuls -s’isolent encore davantage « pour ne pas gêner… ». Avons-nous oublié que les relations sociales forment le socle de notre humanité et sont bénéfiques pour notre moral et notre santé ?
Toute l’essence de Récipro-Cité est là
C'est en 2011 au cours d’un voyage d’études en Allemagne que je découvre une forme d’habitat qui facilite la solidarité intergénérationnelle et favorise le vieillissement à domicile. C’est une révélation : nous devons concevoir et développer en France des formes durables et abordables d’habitat solidaire qui accueillent toutes les générations tout en permettant aux personnes vieillissantes et âgé es de vivre et vieillir chez elles, le plus longtemps possible, sans surcoût, sans institutionnalisation.
Nous nous mettons à l’oeuvre avec une équipe composée d’urbanistes, de géographes, de sociologues et d’architectes qui travaillent en lien avec des universitaires, des chercheurs, des élus, des professionnels de l’habitat social et des habitants-citoyens que nous associons à nos premières études.
Nos hypothèses sont confortées : l’EHPAD, la résidence services séniors, le foyer logement (devenu résidence autonomie) répondent à des besoins mais ne correspondent pas à ce que souhaite la majorité de nos concitoyens : vieillir chez soi, en lien avec les autres, de façon inclusive et non discriminée.
Créer l’habitat intergénérationnel solidaire et durable
Nous sommes confortés dans l’idée qu’il nous faut faire émerger des lieux qui innovent, des lieux qui rassemblent ; des lieux qui facilitent le vivre et le faire ensemble, à tous les âges, des lieux qui créent des liens. Mixité des âges, des générations, des cultures et des origines sociales font partie de ce en quoi nous croyons ; et c’est sur la base de ce postulat que nous avons poursuivi nos études, que nous nous sommes attachés à construire puis tester, des offres, des outils, des méthodes à différentes échelles et dans tous les territoires.
Partager nos pratiques
Convaincus que l’habitat intergénérationnel est le chaînon manquant qui permet à chacun de se loger sans surcoût, d’être à la fois aidé et aidant, de vieillir chez soi et dans son quartier, le plus longtemps possible, entouré de voisins de tous âges, nous consignons nos méthodes dans des guides méthodologiques en nous inspirant des travaux de la thèse de doctorat² de Nathaël Torres, le premier collaborateur salarié de Récipro-Cité.
Ceux-ci décrivent nos phases d’études, depuis la programmation urbaine et architecturale faites de « briques vertueuses de l’intergénérationnel » jusqu’à l’accompagnement des habitants dans leur lieu de vie et la co-construction d’un projet résidentiel contributif durable.
Imaginer de nouveaux métiers
Concevoir la programmation, l’évolutivité et les briques (aussi vertueuses soient-elles) d’un habitat intergénérationnel, n’est pas suffisant pour faire un lieu où il fait bon vivre et vieillir.
Alors nous poussons la démarche encore plus loin, en associant les habitants à la mise en œuvre de leur projet résidentiel. Et nous développons le métier innovant de Gestionnaire-Animateur.trice de résidences intergénérationnelles, véritable artisan du vivre et faire ensemble sur le terrain.
Pour essaimer plus rapidement, nous créons une formation à ce métier, qui accueille sa 2e promotion en septembre 2023.
Et là, ça marche !
Nous créons des résidences intergénérationnelles qui favorisent le vieillissement chez soi, le plus longtemps possible, avec au coeur de chacune une « Maison des Projets », animée par ses habitants, eux-mêmes accompagnés par un.e Gestionnaire-Animateur.trice engagé.e.
Une « Maison des Projets » tellement indispensable !
Polyvalente, elle est le lieu des échanges, des partages, de la création de liens. Elle est le lieu de la convivialité, au même titre que le jardin partagé et d’autres communs régis par une charte et un règlement intérieur rédigés avec les habitants selon des principes de gouvernance participative. Et la Maison des Projets devient place du village, un lieu de vie en somme, et dans « lieu de vie », il y a le mot vie.
Imaginer une vie meilleure pour nos aînés et pour chacun d’entre nous
Vieillissement et… isolement, augmentation du coût du logement, de l’énergie, inflation, baisse du pouvoir d’achat : les raisons de s’émouvoir sont nombreuses. Elles sont comme autant d’indicateurs qui nous alertent sur l’état du monde. Ce qui touche les plus précaires aujourd’hui nous touchera tous demain. Nous pouvons craindre que les crises actuelles, davantage liées à l'activité humaine que nous peinons à juguler qu’à ses conséquences conjoncturelles isolées - à l’image de la guerre qui sévit en Ukraine ou encore la pandémie de la Covid 19 - ne feront que se multiplier.
Du côté de l’habitat déjà, on assiste à des mutations. La raréfaction du foncier, l’augmentation du coût de production des logements, le manque de logements sociaux conduisent les jeunes à pratiquer de plus en plus longtemps la cohabitation. Les plus âgés ont du mal à boucler les fins de mois, sans même parler de ceux qui, ayant fui leur pays, n’ont plus de toit.
Face à cette précarité galopante, nous continuerons d’inventer au quotidien des solutions et des lieux de vie sobres et conviviaux, des lieux pour rire, des lieux pour pleurer, des lieux pour s’aider, pour se parler, pour se connecter à l’autre, son semblable.
L’habitat intergénérationnel, c’est découvrir et accepter l’autre dans sa différence, c’est devenir acteur d’un véritable projet résidentiel, c’est faire et vivre ensemble, dans la complémentarité de tous les âges de la vie.
L’habitat intergénérationnel, c’est aussi l’opportunité de mutualiser nos ressources ; d’agir ensemble, maintenant ; de coopérer pour répondre aux mutations inédites auxquelles l’humanité fait face.
Vous y croyez aussi ?
Rejoignez-nous !
Ce mouvement est plus profond que nous ne l’imaginons.
--
Références
¹ Serge Le boulch, Tedx Talks, TEDxCanebière “L’habitat intergénérationnel solidaire au coeur de la Cité “. 25 juillet 2018. Disponible sur www.youtube.com
² Nathaël TORRES, “Mixité sociale et vieillissement de la population : Quelles perspectives pour un habitat intergénérationnel durable ? ”, Thèse de doctorat en Sciences Sociales, Université Jean Moulin Lyon III, 2020
Nous vivons une période de transitions sans pareille dans l’histoire de l’humanité : transitions et fractures écologique, climatique, démographique et numérique. En avons-nous tous pleinement conscience ? Sommes-nous préparés à les affronter ? Peut-être pas…
Transition démographique et solidarité intergénérationnelle
Nous sommes tous confrontés au vieillissement de nos proches. J’ai raconté il y a 5 ans dans un TedX¹ comment j'avais pris conscience des formes multiples que le vieillissement pouvait prendre suivant notre état de santé, notre lieu de résidence, la persistance ou l’absence de liens familiaux et amicaux. J’ai décrit à quel point la solitude pouvait être mortifère, à quel point la relation humaine, la camaraderie, l’amitié, l’amour sont des sources inépuisables de joie de vivre, à tous les âges de la vie. Je terminais alors mon propos par ces mots :
« L’augmentation de la durée de vie est une chance. La chance de pouvoir vivre ensemble et avec nos aînés plus longtemps et de profiter pleinement d’une relation vraie entre générations. Alors dans ce monde qui va trop vite, prenons le temps. Prenons le temps d’aller plus souvent vers l’autre, d’écrire, de téléphoner, de se rencontrer, de partager des repas, des moments de joie… et de se dire qu’on s’aime quand il en est encore temps »
Une société qui compte de plus en plus d’âgés, de plus en plus âgés...Comment fait-on ?
Depuis longtemps, je sais que nous devons repenser notre relation avec nos aînés, surtout avec ceux qui sont éloignés de leur famille, ceux qui - devenus plus vulnérables ou plus seuls -s’isolent encore davantage « pour ne pas gêner… ». Avons-nous oublié que les relations sociales forment le socle de notre humanité et sont bénéfiques pour notre moral et notre santé ?
Toute l’essence de Récipro-Cité est là
C'est en 2011 au cours d’un voyage d’études en Allemagne que je découvre une forme d’habitat qui facilite la solidarité intergénérationnelle et favorise le vieillissement à domicile. C’est une révélation : nous devons concevoir et développer en France des formes durables et abordables d’habitat solidaire qui accueillent toutes les générations tout en permettant aux personnes vieillissantes et âgé es de vivre et vieillir chez elles, le plus longtemps possible, sans surcoût, sans institutionnalisation.
Nous nous mettons à l’oeuvre avec une équipe composée d’urbanistes, de géographes, de sociologues et d’architectes qui travaillent en lien avec des universitaires, des chercheurs, des élus, des professionnels de l’habitat social et des habitants-citoyens que nous associons à nos premières études.
Nos hypothèses sont confortées : l’EHPAD, la résidence services séniors, le foyer logement (devenu résidence autonomie) répondent à des besoins mais ne correspondent pas à ce que souhaite la majorité de nos concitoyens : vieillir chez soi, en lien avec les autres, de façon inclusive et non discriminée.
Créer l’habitat intergénérationnel solidaire et durable
Nous sommes confortés dans l’idée qu’il nous faut faire émerger des lieux qui innovent, des lieux qui rassemblent ; des lieux qui facilitent le vivre et le faire ensemble, à tous les âges, des lieux qui créent des liens. Mixité des âges, des générations, des cultures et des origines sociales font partie de ce en quoi nous croyons ; et c’est sur la base de ce postulat que nous avons poursuivi nos études, que nous nous sommes attachés à construire puis tester, des offres, des outils, des méthodes à différentes échelles et dans tous les territoires.
Partager nos pratiques
Convaincus que l’habitat intergénérationnel est le chaînon manquant qui permet à chacun de se loger sans surcoût, d’être à la fois aidé et aidant, de vieillir chez soi et dans son quartier, le plus longtemps possible, entouré de voisins de tous âges, nous consignons nos méthodes dans des guides méthodologiques en nous inspirant des travaux de la thèse de doctorat² de Nathaël Torres, le premier collaborateur salarié de Récipro-Cité.
Ceux-ci décrivent nos phases d’études, depuis la programmation urbaine et architecturale faites de « briques vertueuses de l’intergénérationnel » jusqu’à l’accompagnement des habitants dans leur lieu de vie et la co-construction d’un projet résidentiel contributif durable.
Imaginer de nouveaux métiers
Concevoir la programmation, l’évolutivité et les briques (aussi vertueuses soient-elles) d’un habitat intergénérationnel, n’est pas suffisant pour faire un lieu où il fait bon vivre et vieillir.
Alors nous poussons la démarche encore plus loin, en associant les habitants à la mise en œuvre de leur projet résidentiel. Et nous développons le métier innovant de Gestionnaire-Animateur.trice de résidences intergénérationnelles, véritable artisan du vivre et faire ensemble sur le terrain.
Pour essaimer plus rapidement, nous créons une formation à ce métier, qui accueille sa 2e promotion en septembre 2023.
Et là, ça marche !
Nous créons des résidences intergénérationnelles qui favorisent le vieillissement chez soi, le plus longtemps possible, avec au coeur de chacune une « Maison des Projets », animée par ses habitants, eux-mêmes accompagnés par un.e Gestionnaire-Animateur.trice engagé.e.
Une « Maison des Projets » tellement indispensable !
Polyvalente, elle est le lieu des échanges, des partages, de la création de liens. Elle est le lieu de la convivialité, au même titre que le jardin partagé et d’autres communs régis par une charte et un règlement intérieur rédigés avec les habitants selon des principes de gouvernance participative. Et la Maison des Projets devient place du village, un lieu de vie en somme, et dans « lieu de vie », il y a le mot vie.
Imaginer une vie meilleure pour nos aînés et pour chacun d’entre nous
Vieillissement et… isolement, augmentation du coût du logement, de l’énergie, inflation, baisse du pouvoir d’achat : les raisons de s’émouvoir sont nombreuses. Elles sont comme autant d’indicateurs qui nous alertent sur l’état du monde. Ce qui touche les plus précaires aujourd’hui nous touchera tous demain. Nous pouvons craindre que les crises actuelles, davantage liées à l'activité humaine que nous peinons à juguler qu’à ses conséquences conjoncturelles isolées - à l’image de la guerre qui sévit en Ukraine ou encore la pandémie de la Covid 19 - ne feront que se multiplier.
Du côté de l’habitat déjà, on assiste à des mutations. La raréfaction du foncier, l’augmentation du coût de production des logements, le manque de logements sociaux conduisent les jeunes à pratiquer de plus en plus longtemps la cohabitation. Les plus âgés ont du mal à boucler les fins de mois, sans même parler de ceux qui, ayant fui leur pays, n’ont plus de toit.
Face à cette précarité galopante, nous continuerons d’inventer au quotidien des solutions et des lieux de vie sobres et conviviaux, des lieux pour rire, des lieux pour pleurer, des lieux pour s’aider, pour se parler, pour se connecter à l’autre, son semblable.
L’habitat intergénérationnel, c’est découvrir et accepter l’autre dans sa différence, c’est devenir acteur d’un véritable projet résidentiel, c’est faire et vivre ensemble, dans la complémentarité de tous les âges de la vie.
L’habitat intergénérationnel, c’est aussi l’opportunité de mutualiser nos ressources ; d’agir ensemble, maintenant ; de coopérer pour répondre aux mutations inédites auxquelles l’humanité fait face.
Vous y croyez aussi ?
Rejoignez-nous !
Ce mouvement est plus profond que nous ne l’imaginons.
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Références
¹ Serge Le boulch, Tedx Talks, TEDxCanebière “L’habitat intergénérationnel solidaire au coeur de la Cité “. 25 juillet 2018. Disponible sur www.youtube.com
² Nathaël TORRES, “Mixité sociale et vieillissement de la population : Quelles perspectives pour un habitat intergénérationnel durable ? ”, Thèse de doctorat en Sciences Sociales, Université Jean Moulin Lyon III, 2020